THÈME

L’éditeur Stock a sollicité des auteurs reconnus pour passer une nuit dans un musée. Jean-Luc Coatalem a choisi le musée Guimet qui recèle le plus grand nombre de pièces d’art asiatique au monde. Constitué à la fin du XIX ème siècle par un riche industriel lyonnais, rénové il y a plusieurs années, il trône place d'Iéna, face à la statue de Washington. C’est l’occasion pour l’auteur, grand voyageur, de relater nombre de souvenirs de ses voyages en extrême-orient et notamment dans cet hôtel Mékong, près de Paksé, au sud du Laos, où il a séjourné au cours de ses pérégrinations.

L’ouvrage se présente comme une méditation, stimulée par la présence solitaire de notre auteur au musée Guimet. Ce cadre auquel finalement Coatalem se réfère assez peu n’est d’ailleurs qu’un prétexte pour laisser courir l’esprit et, par association, faire naître des impressions. Il en livre une sorte de patchwork d’expériences diverses, de réminiscences de sa famille, de son enfance, de son grand-père, son oncle et son père dont il évoque les figures tutélaires.

Bien sûr, il ne manque pas d’évoquer les écrivains qui, avant lui, ont été hantés par l’Asie, comme Pierre Loti ou Victor Segalen, un Breton voyageur, comme lui. On songe à Blondin et, alcool mis à part, à son Singe en hiver.

C’est parfois poétique, voire lyrique.

Le lecteur se demande ce que vient faire le musée Guimet dans cette affaire. Non seulement la contemplation des objets présentés n’entraîne qu’assez peu l’imagination de l’auteur, mais il s’ingénie à livrer un ensemble de détails triviaux sur sa nuit au musée, les rapports avec les gardiens, les détails de son lit de sangles et de son sac de couchage… qui n’ont aucun intérêt. Il aurait pu rester chez lui et confier de la même manière ses souvenirs à la page blanche. Il donne en outre l’impression d’être très mal à l’aise dans ce lieu dont il s’échappe au petit matin avec soulagement. Pour un baroudeur, c’est étrange. En tous cas le procédé tourne à l’artifice.

Le propos est décousu, manque parfois d’intérêt et d’originalité.

Quant au style, s’il offre parfois de jolis morceaux de bravoure, il recèle aussi des obscurités qui obligent à relire plusieurs fois la phrase pour acquérir la conviction que l’on a compris le propos.

Entre rêve, mémoire de famille, souvenirs de voyage, un ouvrage impressionniste qui parlera peut-être aux passionnés d’Asie, car il faut l’être pour suivre l’auteur dans ses pérégrinations mémorielles.

« …j’avais vu Venise s’ériger tel un entre-monde, et que j’étais entré dans ce mirage, entre le capot et la danse des feux mouillés, que j’avais compris que tout était là, et que j’y étais, dedans, inclus, mieux, que la cité se concrétisait à travers moi, mon souffle, mon passage, comme s’il me revenait d’être le témoin de son épopée - oui, je la faisais exister. » P.102

Considéré comme un écrivain voyageur, dans la lignée de Nicolas Bouvier, Jean-Luc Coatalem, journaliste et écrivain, a publié de nombreux ouvrages, récits de voyage ou romans. Il a reçu de nombreux prix dont le Prix des Deux Magots pour Je suis dans les mers du Sud ( Grasset, 2001), le Prix Roger Nimier pour Le Gouverneur d’Antipodia (Le Dilettante, 2012), le Prix de la langue française et le Prix Femina essai pour Mes pas vont ailleurs (Stock, 2017).

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QOSHE - "Une Chambre à l'Hôtel Mékong" de Jean-Luc Coatalem : une méditation au musée Guimet - Jean-Pierre Tirouflet
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"Une Chambre à l'Hôtel Mékong" de Jean-Luc Coatalem : une méditation au musée Guimet

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22.12.2023

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L’éditeur Stock a sollicité des auteurs reconnus pour passer une nuit dans un musée. Jean-Luc Coatalem a choisi le musée Guimet qui recèle le plus grand nombre de pièces d’art asiatique au monde. Constitué à la fin du XIX ème siècle par un riche industriel lyonnais, rénové il y a plusieurs années, il trône place d'Iéna, face à la statue de Washington. C’est l’occasion pour l’auteur, grand voyageur, de relater nombre de souvenirs de ses voyages en extrême-orient et notamment dans cet hôtel Mékong, près de Paksé, au sud du Laos, où il a séjourné au cours de ses pérégrinations.

L’ouvrage se présente comme une méditation, stimulée par la présence solitaire de notre auteur au musée Guimet. Ce cadre auquel finalement Coatalem se réfère assez peu n’est d’ailleurs qu’un prétexte pour laisser courir l’esprit et, par association,........

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