Christian Bourion : À partir du moment où vous évoquez l'ennui, vous introduisez une connotation émotionnelle qui tend vers le négatif. Cela signifie que le cerveau peut ressentir une forme de souffrance.

Pourtant, il existe des contre-exemples. Personnellement, je suis à la retraite depuis plus d'une décennie et je suis parfaitement heureux. Ce bonheur découle probablement de ma carrière où j'ai travaillé ardemment et réussi. Même en ne faisant rien de professionnel maintenant, je ne m'ennuie jamais et je trouve satisfaction dans cette situation.

On peut alors avancer que le fait de ne rien faire peut en réalité réduire voire éliminer la pression, ce qui peut être perçu positivement. Ainsi, il est crucial de distinguer entre les différentes situations.

En conclusion, l'ennui est souvent associé à des émotions négatives, mais il existe des cas où le fait de ne rien faire peut être bénéfique. Il est donc important de considérer chaque situation individuellement pour en évaluer les aspects positifs et négatifs.

L'ennui professionnel est un véritable mécanisme de destruction de la personnalité. Lorsque quelqu'un est embauché avec un contrat, son cerveau élabore une série de normes. Ces normes, par la suite, peuvent être confrontées à des écarts avec la réalité. Ces écarts par rapport aux normes établies peuvent engendrer une souffrance presque constante.

Chez les personnes qui possèdent des capacités intellectuelles supérieures ou une grande flexibilité mentale, ces normes peuvent être ajustées, réduisant ainsi l'écart entre leurs attentes et la réalité, ce qui les place dans une situation plus confortable. Cependant, cela ne représente pas la situation générale.

L'ennui au travail, sur lequel je concentre mes recherches, est spécifiquement destructeur pour la personnalité, les objectifs, les perspectives et les réalisations. En psychiatrie, il existe des individus qui parviennent à composer avec des réalités négatives. Le cerveau est capable de manipuler et de remodeler ces réalités de manière qu’elles ne portent pas préjudice à l'individu dans une mesure excessive.

À mon sens, l'importance réside dans la nature de l'oisiveté. Par exemple, lorsque vous êtes à la retraite, l'oisiveté devient une composante structurelle de votre vie, ce qui peut être très bénéfique. C'est une situation à laquelle vous avez aspiré.

En revanche, lorsqu'il s'agit d'une situation de travail où vous êtes délibérément ou involontairement relégué à l'écart, comme dans le cas d'une mise au placard, je ne vois que des aspects négatifs. Bien que certaines personnes puissent s'adapter à cette situation, cela reste préoccupant. Je me souviens avoir été surpris en rencontrant de telles personnes, bien que je ne comprenne toujours pas entièrement pourquoi.

Les mécanismes que j'ai observés et étudiés incluent des individus qui ont quitté leur emploi, comme une femme qui m'a dit un jour : « Je termine tous les dossiers qui me sont confiés dès 9h15, après avoir commencé à travailler à 8h ». Ces personnes ont compris qu'elles n'étaient plus en phase avec leur emploi. À l'époque de mon étude, il était difficile de trouver un autre emploi rapidement, mais les choses ont peut-être changé depuis lors. Ainsi, si vous vous retrouvez dans une situation où la structure ne vous offre pas les responsabilités ou les tâches auxquelles vous aspirez, cela peut être un signal qu'il est temps de partir. Parfois, certaines sociétés ou postes de travail sont intrinsèquement ennuyeux, comme ceux impliquant la surveillance d'un quartier ou un poste d'accueil lorsqu'il n'y a personne. Dans ces cas-là, l'oisiveté fait effectivement partie du travail.

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L’ennui, ce temps perdu qui nous fait pourtant gagner tellement

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28.03.2024

Christian Bourion : À partir du moment où vous évoquez l'ennui, vous introduisez une connotation émotionnelle qui tend vers le négatif. Cela signifie que le cerveau peut ressentir une forme de souffrance.

Pourtant, il existe des contre-exemples. Personnellement, je suis à la retraite depuis plus d'une décennie et je suis parfaitement heureux. Ce bonheur découle probablement de ma carrière où j'ai travaillé ardemment et réussi. Même en ne faisant rien de professionnel maintenant, je ne m'ennuie jamais et je trouve satisfaction dans cette situation.

On peut alors avancer que le fait de ne rien faire peut en réalité réduire voire éliminer la pression, ce qui peut être perçu positivement. Ainsi, il est crucial de distinguer entre les différentes situations.

En conclusion, l'ennui est souvent associé à des émotions négatives, mais il existe des cas où le fait de ne rien faire peut être bénéfique. Il........

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