Mickaëlle Paty et son avocate Carine Chaix ont envoyé un recours administratif le 15 mars au Premier ministre et aux ministres de l’Intérieur et de l'Éducation nationale, lesquels ont deux mois pour répondre, avant que l'affaire ne soit portée devant la justice administrative.

Mickaëlle Paty accuse l’État d’avoir failli à sa mission de protection de l’un de ses agents, son frère. Son avocate explique que « La vérité de cette affaire c’est que Samuel Paty a été décapité à cause de la conjonction mortelle entre la volonté du terroriste de commettre un crime barbare au nom de l’islam et les défaillances de toute la chaîne de responsabilité de l’État au sein du ministère de l’Intérieur et de l’Éducation nationale ».

La démarche reflète le combat de la sœur du professeur d'histoire-géographie, qui demande à l'État une somme « symbolique » qui sera reversée à des associations soutenant la laïcité à l’école. Nous publions un texte dans lequel elle détaille le sens de sa démarche.

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Le combat que je mène aujourd'hui pour la mémoire de mon frère Samuel Paty vise à faire vivre ce qu'était sa présence. Il était un défenseur de la démocratie, de l'universalisme, de la rationalité, de la laïcité et de la liberté d’expression. Il combattait les pensées manichéennes sans nuance, car on a tendance à voir ce que l'on souhaite voir quand on va de l'idée aux documents et non des documents à l'idée. Ce combat, je le mène pour nos libertés et indéniablement pour notre sécurité.

Si la volonté est que de pareils drames ne se reproduisent vraiment pas, alors il faut avoir le courage de les regarder en face, de les comprendre d'abord puis de reconnaître les responsabilités de chacun dans l'engrenage infernal qui a fini par l'attaque terroriste islamique et la décapitation de mon frère.

Chacun doit assumer sa propre responsabilité et celle de l'un n’amoindrit pas ou n’exclut pas celle de l'autre.

L’État ferait amende honorable d'effectuer un travail d'introspection sur le traitement des offensives de déstabilisation de l'institution scolaire et du modèle républicain. On ne peut plus parler de simples contestations qui relèveraient d'un esprit de contradiction, l'opposition virulente par l'utilisation de la terreur montre clairement qu’on ne peut pas s’asseoir à la table des négociations.

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La réplique aboutie avec l'assassinat de Dominique Bernard et les répliques avortées non moins alarmantes devraient provoquer le sursaut que tout le monde attend. Car les enseignants et personnels d'éducation sont des acteurs essentiels de notre République démocratique et laïque.

Les agressions, les violences, les menaces ou les outrages ne sont pas un sentiment d'insécurité. Ce sont des faits et ces faits ne seront jamais tolérables. Commencer à les tolérer sans apporter une réponse ferme, publique et immédiate, c’est accepter que les menaces puissent être mises à exécution.

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L’État ne peut manquer à son devoir de reconnaître sa responsabilité lorsqu'il a manqué à la charge qui était la sienne : garantir la protection et la sécurité des enseignants qui eux prennent chaque jour ce qu'il convient de nommer un risque de transmettre aux enfants de la République le socle commun de connaissances, principes et valeurs dont ils ont besoin pour devenir des adultes éclairés et responsables.

Persister dans son aveuglement n'est pas une erreur, c'est une décision.

QOSHE - "Persister dans son aveuglement n'est pas une erreur, c'est une décision" : Mickaëlle Paty accuse l'État - Etienne Campion
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"Persister dans son aveuglement n'est pas une erreur, c'est une décision" : Mickaëlle Paty accuse l'État

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20.03.2024

Mickaëlle Paty et son avocate Carine Chaix ont envoyé un recours administratif le 15 mars au Premier ministre et aux ministres de l’Intérieur et de l'Éducation nationale, lesquels ont deux mois pour répondre, avant que l'affaire ne soit portée devant la justice administrative.

Mickaëlle Paty accuse l’État d’avoir failli à sa mission de protection de l’un de ses agents, son frère. Son avocate explique que « La vérité de cette affaire c’est que Samuel Paty a été décapité à cause de la conjonction mortelle entre la volonté du terroriste de commettre un crime barbare au nom de l’islam et les défaillances de toute la chaîne de responsabilité de l’État au sein du ministère de l’Intérieur et de l’Éducation nationale ».

La démarche reflète le combat de la sœur du professeur d'histoire-géographie, qui demande à l'État une somme « symbolique » qui sera reversée à des associations........

© Marianne


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