À partir d’une brève scène observée dans le Village, l’auteur explore la manière dont les vulnérabilités s’inscrivent dans le paysage urbain

À l’intersection Sainte-Catherine et Saint-Timothée, je suis assis sur une chaise rose bordée de plantes. J’ai appris à m’y réfugier, comme on retourne à un lieu de mémoire inévitable. Je relis un livre comme on rouvre une plaie pour vérifier si elle a cicatrisé : Le balcon de Jean Genet. Un classique que j’aime lire en plein air pour faire semblant d’appartenir aux « transfuges de classe » dont parle Pleau dans Rue Duplessis.

Comme dans un rêve éveillé, tout autour de moi bascule : les pages du Balcon s’envolent, cédant la place à une scène trop réelle pour être ignorée. « Maman, que fait cette madame-là ? », demande un enfant, le doigt tendu vers une femme agenouillée sur le trottoir, perdue dans le rituel hypnotique de l’injection.

La mère détourne les yeux, accélère le pas. Mais l’enfant regarde sans filtre, avec une naïveté tranchante. Sa question fend le murmure du trottoir. Le flot des passants ralentit. La scène devient tableau. La mère ne........

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