Diaboliser l’autre pour se dédiaboliser soi-même
Comment expliquer le fait que les propos d’un député solidaire, Haroun Bouazzi, qui critique la présence d’une « construction de l’Autre » dans certains discours de l’Assemblée nationale, apparaissent comme inacceptables, maladroits, exagérés ou clivants, tandis qu’une foule de propos faisant des raccourcis et amalgames en diabolisant les immigrants passent comme acceptables ou raisonnables ?
Plusieurs députés de la Coalition avenir Québec (CAQ) et du Parti québécois (PQ) jouent depuis un bon moment sur la « surenchère identitaire » en attribuant à l’immigration la quasi-totalité des problèmes de la société : pénurie de logements, crise des services publics, recul du français, listes d’attente en chirurgie, etc.
Le premier ministre du Québec, François Legault, a déclaré que « 100 % du problème de logement vient de l’augmentation du nombre d’immigrants temporaires », ou qu’il faudrait expulser plus de 80 000 immigrants sans papiers vers d’autres provinces. Le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, parle d’une « crise sociale sans précédent » causée par des seuils astronomiques d’immigration, considérant qu’elle pourrait nuire au taux de natalité des Québécois. Ces dérapages n’ont pas suscité le même émoi, le même niveau d’indignation ni d’appels à l’exclusion.
Les discours marqués à gauche ou associés à l’antiracisme sont déplacés hors de la fenêtre d’Overton, comme si les positions modérées d’autrefois en faveur de la tolérance et la diversité devenaient extrémistes, alors que les idées associées au populisme conservateur deviennent de plus en plus « normales » et « populaires ».
Ce déplacement toujours........
© Le Devoir
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