Tête de cochon
En 1131, le royaume de France passe bien près de perdre pied à cause d’un cochon. En pleine ville, ce symbole de l’impureté ose, en plein jour, culbuter le destrier monté par le roi. Parti en simple promenade, le jeune héritier Philippe tombe de son cheval. Il est désarçonné. L’illustre cavalier se heurte violemment au sol. Il meurt.
Le roi tué par un cochon ! Qui le croit ? Comment est-ce possible ? Dans un monde qui craint les feux de l’enfer, où l’imagination ne sait pas mettre pied à terre, cette mort semble présager le plus noir des destins au royaume. Comment sauver la monarchie et ses sujets de cette effroyable souillure symbolique ? Le ciel est appelé en renfort pour que le soleil très haut brûle, dans le silence, cet affront fait ici-bas au trône.
Le pourpre royal, la couleur jusque-là emblématique de la monarchie, est délaissé dans la foulée. Pour redorer la couronne souillée lui est préféré le bleu céleste. Le blanc du lys, symbole de la pureté immaculée de la vierge, est aussi mis à contribution. Ainsi l’azur et le blanc virginal se donnent la main pour proclamer la pureté du pouvoir, son caractère sacré, sa légitimité.
Le drapeau québécois, lys blanc sur fond d’azur flanqué d’une croix, est en partie l’héritier lointain de cette histoire-là. Bref, depuis le fond des temps, il y a du cochon qui, de loin en loin, remonte jusqu’à nous.
Le Québec est d’ailleurs le royaume du cochon. Depuis des décennies, les porcheries ont poussé partout. Des millions de cochons sont produits en série. Comptez chaque année presque le même nombre de........
© Le Devoir
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