Le mépris
Depuis des années, j’ai pris l’habitude de parcourir les catalogues que me font parvenir, de loin en loin, des libraires de livres anciens. Ils furent longtemps diffusés en format papier, à intervalles plus ou moins réguliers. Désormais, à l’heure du numérique, ces passeurs se retrouvent en partie étouffés sous le flot des illusions promises par les nouveautés et les communications à tout vent.
Je n’aime pas moins qu’avant ces bouquinistes. En gardiens de savoirs anciens, sans se soucier des effets de la dernière mode, ils portent attention aux livres autant qu’aux vieux papiers, aux cartes géographiques, aux manuscrits, aux photographies. Les seuls descriptifs de leurs lots constituent déjà, très souvent, une clé qui ouvre les portes de mondes insoupçonnés.
Prenez le catalogue le plus récent du libraire Roger Auger. Il y présente des photographies anciennes. M. Auger a décidé de céder des images qu’il a collectionnées patiemment, à gauche et à droite, au fil de nombreuses années passées à chiner de tous les côtés.
Mon oeil s’arrête sur une description de plaques de verre. Ce sont des négatifs. Du verre sur lequel est couchée une mince pellicule de sels d’argent dans laquelle la lumière a figé un fragment d’éternité. Ces images du XIXe siècle sont l’oeuvre des Livernois. À Québec, pendant un siècle, cette famille de photographes fut le miroir de tout un monde. Des gens qu’ils ont photographiés sur ces plaques, en habits du dimanche, nous ne connaissons que les noms. Perrault, Thériault, Blais, Charbonneau, Beaulieu, Ferland… Il y a là........
© Le Devoir
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