Législatives 2024 : les 1001 paradoxes français
Atlantico : Quels sont les principaux enseignements de la soirée électorale du second tour des législatives ? Qui a véritablement gagné ou perdu ?
Jean Petaux : Je pense que l’on peut retenir 4 faits majeurs au soir du second tour qui peuvent donner lieu à enseignement.
Stewart Chau : La participation pour le second tour des législatives est très élevée, à 67 %. Il s’agit de l'un des enseignements les plus marquants. Il y en a d’autres mais cela montre que l'exercice démocratique, lorsque les Français en identifient l'enjeu, est toujours suivi. La mobilisation des électeurs s'est portée très largement dans cet entre-deux tours sur une mobilisation contre le Rassemblement national et pour le front républicain. Cela constituait l’une des interrogations majeures de la campagne pour le second tour. Le front républicain constituait-il toujours un appel à mobilisation ? Force est de constater que cela est bien le cas. Cette participation a été très largement motivée par un enjeu évident : faire barrage au Rassemblement national. Cette tendance s’est exprimée très clairement dans l'ensemble des duels qui ont opposé la majorité présidentielle au Rassemblement national et le Nouveau Front populaire au Rassemblement national.
Le RN, selon les projections, avait été estimé à 220 sièges, il serait entre 150 à 160 députés. Ces résultats sont un échec pour le Rassemblement National qui avait pourtant réussi à catalyser toutes les colères pour surpasser le barrage républicain.
Le front républicain a été, à mon sens, plus fort et plus puissant que la colère exprimée par un certain nombre d'électeurs du Rassemblement national. La participation montre aussi que ce front républicain a encore de beaux jours devant lui. Ce n’était pas un thème central durant la campagne.
Au regard de la conjoncture politique et du contexte politique global, certaines tendances suivent les évolutions dynamiques qui ont émergé dès les européennes. Dans le cadre des législatives, le soufflet retombe pour le Rassemblement National qui n’obtient pas la majorité absolue à l'Assemblée nationale. Les résultats du RN ne sont pas du tout à la hauteur des ambitions qu'ils avaient pour le second tour. Le front républicain reste dominant dans notre pays, malgré la dynamique croissante et l'adhésion de plus en plus de Français aux constats et aux idées portées par le Rassemblement National.
Au-delà de cette cartographie globale, la question va être de savoir quels sont les choix qui motivent les décisions politiques et celles qui seront prises dans les prochains jours. Il est donc important de savoir quels sont ceux qui ont réellement perdu et ceux qui ont véritablement gagné dans le cadre de ce scrutin. Cela permet de se rendre compte de l’évolution du centre de gravité politique. Il n’est plus à droite. Il s’est déplacé et concerne le centre droit et la social-démocratie. Malgré le maintien d'un bloc central de la majorité présidentielle, la formation politique d’Emmanuel Macron connaît une baisse extrêmement importante du nombre de ses députés à l’Assemblée à l’occasion de ces législatives 2024. Il y a aussi une baisse de l'ensemble des alliés MoDem et Horizons. Le vote est venu sanctionner le Président de la République, le gouvernement et la politique qui a été mise en place.
Il y a une progression du RN, même si la dynamique est retombée. Au regard des projections concernant l’entre-deux tours, un raz-de-marée voire même une possible majorité absolue étaient anticipés.
Ce dimanche, la progression du RN est notable et très importante. Elle ne permet pas de renverser la table. Ces scores permettent de reculer pour mieux sauter.
Ces élections témoignent de la stabilité du bloc de gauche et de la progression très forte de la social-démocratie. Cet électorat en France s'est plus que jamais mobilisé dans ce scrutin et a soutenu les candidats de la sociale démocratie.
Cela témoigne de l’évolution du centre de gravité politique aujourd'hui en France. Il se situe au centre gauche ou à la gauche modérée et plus du tout au centre droit, voire à la droite. Il y a deux voies qui sont irréconciliables. Il y a le RN avec une poussée qui est notable et un centre de gravité social-démocrate extrêmement puissant. Le président de la République va devoir combiner ces injonctions contradictoires. Il va falloir pour le bloc central reconnaître sa défaite et pour le Bloc de gauche reconnaître que la social-démocratie aujourd'hui l'emporte, en dépit du fait que LFI soit pour l'instant, selon les projections, le groupe majoritaire sur ce bloc de gauche. Il y a donc plusieurs lectures. La manière dont seront lus les résultats et la manière dont sera interprété tout cela et les conséquences que cela va amener, qui seront décisifs pour les semaines à venir.
La France est-elle ingouvernable ? Va-t-on assister à un chaos institutionnel ? La coalition entre Emmanuel Macron et le Nouveau Front Populaire ou d'autres forces politiques a-t-elle des chances de voir le jour ?
Jean Petaux : Je ne crois pas à un « chaos institutionnel ». Les institutions de la Cinquième république sont suffisamment solides et souples pour « absorber » les soubresauts qu’une telle configuration politique et électorale ne va pas manquer de provoquer. Si la nouvelle........
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