Avatar : la réincarnation néo-colonialiste du « bon sauvage » et ses impasses écologiques |
Pandora n’est pas l’Amazonie. Pourtant, depuis plus de quinze ans, la saga Avatar entretient la confusion entre fiction et réalité, nourrissant le mythe séduisant mais problématique du « bon sauvage écologiste ».
La sortie d’Avatar : de Feu et de Cendres le 17 décembre, donne l’occasion de revenir sur un parti pris représentationnel qui irrigue la saga : « le bon sauvage écologiste ».
Le « bon sauvage » reste encore un important référent dans nos imaginaires occidentaux ainsi que nous le présentions dans notre récent ouvrage, L’héroïsation du bon sauvage de l’antiquité au XXIᵉ siècle : émergence de l’éco-spiritualisme. À ce titre, l’actualisation moderne de cette figure se fait autour d’une vision romantique et écologistante dominante dans notre société du spectacle. Cela représente un impensé problématique, puisque le mythe du bon sauvage lie les peuples autochtones à une norme impossible et une assignation identitaire archaïque.
Le parallèle entre la réalité amazonienne des peuples premiers et les personnages du film, remplis de pureté et de sagesse mythologique, est directement assumé par le réalisateur. L’univers d’Avatar nous plonge dans un imaginaire édénique sur la planète Pandora, couverte d’une jungle luxuriante qui devient le théâtre d’un choc entre une population autochtone idéalisée et des barbares humains venus exploiter un minerai rare. Cet imaginaire occidental est problématique à plusieurs titres.
James Cameron assume directement la comparaison entre son film de science-fiction et la réalité complexe de l’Amazonie. Par exemple, il a demandé aux acteurs de s’immerger dans la jungle amazonienne auprès des indigènes du Brésil avant le tournage du deuxième film, déclarant : « Je veux amener mes acteurs ici, pour pouvoir mieux raconter l’histoire ». Il dresse ensuite un parallèle direct entre son film et la lutte contre le barrage de Belo Monte, multipliant les interventions dans la presse où fiction et réalité amazonienne semblent absolument comparables.
Par ailleurs, l’internationalisation de la « wilderness » étatsunienne et son imaginaire socio-politique transparaît aussi dans l’œuvre de James Cameron. La wilderness traduit un rapport particulier à la nature sauvage et édénique, où l’humain n’est qu’un visiteur temporaire, comme défini par le Wilderness Act de 1964 aux États-Unis. Outre-Atlantique, elle occupe une place centrale dans l’histoire et la culture : elle symbolise d’abord la frontière à conquérir pour l’expansion pionnière, puis devient un idéal de préservation. Cet éco-imaginaire de wilderness doit être appréhendé culturellement.
L’étude de Lawrence........