Sexe, jazz, alcool et jeux : comment Montréal vivait la nuit au XXᵉ siècle
L’histoire de la réglementation nocturne à Montréal montre comment la gestion de la vie nocturne a accru les pouvoirs et les budgets de la police, tout en frappant de manière disproportionnée les travailleuses et travailleurs du sexe, la communauté queer et les employés de l’hôtellerie et de la restauration.
Pendant la majeure partie de la première moitié du XXe siècle, Montréal s’est forgé une réputation de capitale nord-américaine de la vie nocturne. Les touristes fréquentaient les cabarets, les clubs de jazz et les bars ouverts après les heures légales, et déambulaient dans le quartier du Red Light, où le sexe, les jeux de hasard et l’alcool étaient librement accessibles à toute heure.
Cette permissivité reposait sur un arrangement tacite, mais illégal : policiers, politiciens, tenancières de maisons closes, membres de la pègre, chauffeurs de taxi, artistes et propriétaires d’établissements participaient tous à une économie nocturne protégée.
Au milieu des années 1950, cette tolérance est devenue le point de départ de l’une des plus grandes expansions de l’autorité policière dans l’histoire urbaine canadienne.
Comme je l’examine dans mon livre Montreal After Dark : Nighttime Regulation and the Pursuit of a Global City (pour l’instant disponible en anglais uniquement), les dirigeants politiques de Montréal ont commencé à considérer le contrôle de la vie nocturne non pas comme une question marginale, mais comme un élément central de l’ordre civique et de la modernité. Ce changement a profondément transformé la police, et en retour la société montréalaise et québécoise.
Dans les années 1940, le service de police de Montréal était déjà surchargé. Les agents faisaient respecter le couvre-feu en temps de guerre, protégeaient les sites industriels et luttaient contre les infections sexuellement transmissibles parmi les soldats et la population civile. La surcharge du service, combinée à de faibles salaires et à un contrôle constant des économies clandestines, créait un terrain propice à la corruption et aux pots-de-vin.
Une brigade de policiers (« l’escouade de la moralité ») — renforcée pendant la guerre en raison des inquiétudes liées à la délinquance — patrouillait dans les théâtres, les bars, les parcs et les lieux fréquentés par les personnes queers ou les jeunes.
Les jeunes femmes étaient fréquemment arrêtées pour comportement « immoral », tandis que les hommes homosexuels étaient piégés et harcelés. La brigade de Montréal ressemblait à ses homologues nord-américaines, notamment à Toronto où le département de la moralité........





















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