J’ai été curieusement affecté par la mort de Jean-Louis Murat. Je n’étais pas un fan. J’avais acheté en 1991 son disque le plus connu, Le Manteau de pluie et aimé sa langue, sa poésie, ses sons tirés de la nature. J’avais écouté quelques autres chansons qui nous parlent d’amour sur un mode un peu triste, mais vivant, sentimental et sensuel, de rupture beaucoup. Mais je n’avais pas suivi. Le personnage restait présent pour moi, ancré dans son Puy-­de-Dôme natal, peut-être parce que je suis amoureux du Massif central, cœur des terres de France. Je savais son irrespect pour les potiches glorieuses de sa profession. Je crois que ce que j’aimais surtout, c’est que cet Auvergnat revendiqué, du seul fait d’exister, mettait en dissonance cognitive les adeptes de la mondialisation, pour qui enracinement signifie laideur, lenteur et lourdeur, avec leur icône répulsive, le prolo du Rassemblement national. Murat était supérieurement beau et élégant, le bleu inouï de ses yeux transperçant les stéréotypes de la ­branchitude globalisée.

QOSHE - Emmanuel Todd : "Jean-Louis Murat, l'antimondialisation et les Terres de France" - Emmanuel Todd
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Emmanuel Todd : "Jean-Louis Murat, l'antimondialisation et les Terres de France"

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17.06.2023

J’ai été curieusement affecté par la mort de Jean-Louis Murat. Je n’étais pas un fan. J’avais acheté en 1991 son disque le plus connu, Le Manteau de pluie et aimé sa langue, sa poésie, ses sons tirés de la nature. J’avais écouté quelques........

© Marianne

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