Rira bien
Leurs pupilles s’élargissent aux proportions d’une loupe lorsqu’ils l’écoutent. Le grand rire de la vice-présidente des États-Unis, Kamala Harris, les heurte. Ils le jugent insupportable. Au point de croire bon d’en faire l’objet d’une campagne de dénigrement.
De la même façon, pourquoi certains font-ils les yeux ronds devant les rires en cascade de la mairesse de Montréal ? Les éclats sonores de Valérie Plante ne sont pas, à leurs yeux, admissibles. L’ancien maire Denis Coderre, vous vous souvenez, avait tenté de déprécier Valérie Plante en condamnant son rire. Ce qui n’a pas épargné au politicien de connaître un chemin de croix, jusqu’à le voir battre la semelle sur le chemin de Compostelle.
Dans la Turquie du régime nationalo-conservateur de Recep Tayyip Erdogan, le vice-président Bülent Arınç s’était fait remarquer, lui aussi, pour sa condamnation du rire des femmes. Le rire féminin, pour lui, ne pouvait qu’être glaçant et indécent. Il conduisait, disait-il sans même sourire, au déclin de la société moderne. Rien de moins.
Partout, de pareils vieux messieurs entendent imposer le silence comme pour mieux se faire croire qu’on les écoute encore.
Sourire et rire sont une affaire de classe. Dans l’histoire de l’art, éclatant reflet de certaines conceptions de la vie en société, le sourire est longtemps considéré comme une inconvenance. Ouvrir la bouche, montrer les dents, sourire, rire, cela........
© Le Devoir
visit website