Laïcité : voilà ce que nous disent vraiment ceux qui se félicitent que la tolérance des jeunes Français soit bien supérieure à celle de leurs aînés

Une enquête d’opinion sur les 18-30 ans, a entendu évaluer le rapport entre des jeunes mondialisés et la tolérance à la diversité : traduisez, en finir avec la laïcité.

Les historiens Charles Mercier, de l’université de Bordeaux, et Philippe Portier du CNRS, ont dirigé une enquête sur le rapport des 18-30 ans à la laïcité. L'objectif était d'évaluer dans quelle mesure l'inscription ou non des jeunes dans un environnement globalisé a une incidence sur leur positionnement à l'égard de la laïcité française. Deux laboratoires de recherche français ont réalisé, avec l’institut Kantar, l’enquête, de ce domaine dit, « encore inexplorée ». Dans un entretien au Monde, les deux historiens donnent leur lecture de cette enquête. En substance, ils expliquent que la jeunesse, influencée par la mondialisation, est plus ouverte à l’expression des identités religieuses, et qu’ainsi, au regard de la laïcité « la tolérance des jeunes français est bien supérieure à celle de leurs ainés ». Ils en développeraient une conception plus « inclusive » nous dit-on. La formule en dit déjà beaucoup sur la façon d’en juger.

L’état de réceptivité et de compréhension de la laïcité, un enjeu biaisé

Les jeunes se disent à 52% sans religion, ce qui est interprété comme leur éloignement du religieux institutionnel, mais qui seraient en revanche, beaucoup plus libéraux vis-à-vis des manifestations religieuses individuelles, des signes religieux. Le principe de laïcité serait avant tout, pour 29% de « mettre toutes les religions sur un pied d'égalité », pour 27 % « la liberté de conscience des citoyens », pour 22% « séparer les religions de la sphère politique et de l’Etat », pour 15 % « faire reculer l’influence des religions ». On en déduit la tendance dominante à une « laïcité d’ouverture », passant par l’égalité entre les cultes. Ce que révèle surtout les questions posées, c’est la confusion ainsi créée envers la laïcité, étrangère à l’idée « d’égalité de traitement des religions » (concordat) autant qu’à la volonté de « recul » de celles-ci (athéisme). On oriente ainsi inévitablement les réponses au regard de ce qu’elle n’est pas. Selon l’enquête, 89 % des interrogés comprennent et connaissent bien le terme laïcité, mais au vu des réponses obtenues aux questions posées, on ne peut qu’en douter, à moins que l’on cherche effectivement à leur faire dire autre chose. Derrière cette idée de « mettre toutes les religions sur un pied d’égalité », on interroge quelque chose d’autre que la laïcité, la reconnaissance par l’Etat des communautés religieuses, le choix du multiculturalisme, en fait, son contraire. Un égal traitement des cultes par l’Etat l’engagerait à garantir leur entretien, rompant avec la séparation, et ainsi avec la protection de la liberté de conscience de tous, l’égalité entre les citoyens.

Concernant la tolérance aux signes religieux, pas de raz-de-marée. La question a été posée à des salariés d’entreprises privées, des agents du service public, des élèves de lycées publics. 44% en moyenne y sont favorables, 28% opposés, mais surtout, 25 % n’y sont ni favorables ni opposés. Ce qui souligne l’importance d’une transmission fidèle du principe de laïcité qui........

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