Dans une note de 20 pages publiée le 7 mars, le gouvernement faisait mine de vouloir relancer la croissance des denrées alimentaires issues de l’agriculture biologique. Face au recul des achats de produits bio par les ménages, il sollicitait la restauration collective pour prendre le relais. Mais cette dernière donne la priorité aux produits importés à bas prix.

Les différentes communications que nous avons pu lire à l’occasion de la tenue du Salon international de l’Agriculture nous montrent que les consommateurs français naviguent sur un océan de contradictions. Ils font part de leur désir de consommer français en réduisant le bilan carbone de leur alimentation. Mais le recul de leur pouvoir d’achat les oriente vers les «premiers prix» dans les magasins de la grande distribution. Rendu public le 7 mars, un texte commun du gouvernement et de l’Agence de la transition écologique (ADEME) nous dit que « la majorité des Français (77%) semble considérer que les citoyens font leur part de l’effort de sobriété ». Du coup, « ils attendent des actions plus fortes de la part de l’État et des entreprises ».

Publié le 26 février, au troisième jour de la tenue du Salon de l’Agriculture, un communiqué commun du gouvernement, de la structure étatique FranceAgriMer et de l’Interprofession des fruits et légumes, faisait état d’une enquête d’opinion pour indiquer qu’en 2023 « 94% des Français indiquent avoir confiance dans les fruits et légumes frais; un indicateur de confiance qui reste stable pour la quatrième année consécutive et positionne les fruits et légumes au même niveau que le pain».

La comparaison avec le pain est plutôt osée, sachant qu’il est produit à près de 100% à partir de blé cultivé en France. Mais en moyenne, environ 30% des légumes 70% des fruits consommés en France sont importés des autres pays membres de l’Union européenne et de certains pays tiers dont le Maroc et la Nouvelle Zélande. La part des importations est comprise entre 40 et 50% pour les tomates, les concombres et les courgettes selon les saisons, celle des pêches atteint 40% en moyenne et celle du raisin de table 74%.

La situation agriculteurs qui se sont récemment convertis en agriculture biologique est particulièrement difficile. Car le recul du pouvoir d’achat de nombreux consommateurs depuis deux ans fait reculer les débouchés. Selon l’Interprofession des fruits et légumes « la descente en gamme et les arbitrages de consommation ont entraîné en 2022 un recul de 12% sur un an des achats en volumes de produits bios». Selon Jérôme Caillé président de la commission bio de la Coopération agricole, « la contractualisation ne fonctionne plus car les distributeurs se sont désengagés. Le marché ne permet plus de soutenir l’investissement des opérateurs ni la rémunération des producteurs ». En production de lait de vache, les 1.000 litres de lait bio étaient vendus 100 à 120€ de plus que le lait conventionnel soit environ 530€ contre 420€ avant la crise des débouchés. Actuellement cette différence n’est plus que de 30€ pour 1.000 litres et le prix du lait bio fut parfois plus bas que celui du lait conventionnel pendant de longs mois en 2022.

Un document publié en février par le ministère de l’Agriculture et titré « Programme ambition bio 2027» indique qu’en 2022, « la surface agricole biologique atteint près de 2,9 millions d’hectares, représentant 10,7% de la Surface Agricole Utile (SAU) française ». Mais en 2022, « le marché alimentaire biologique à domicile a subi une baisse de 4,6% par rapport à 2021 et s’établit à 12,1 milliards d’euros, soit 6% du marché alimentaire total », lit-on dans ce document.

En page 6 figure l’information suivante: « La loi EGAlim1 a instauré l’obligation de 50% pour les gestionnaires de restauration collective des établissements publics de garantir que des denrées utilisées pour lé fabrication des repas soient durables et de qualité, dont 20% issus de l’agriculture biologique, à compter du 1er janvier 2022. Depuis le 1er janvier 2024, cette obligation a été étendue à tous les restaurants collectifs, y compris ceux des entreprises privées, par la loi Climat et Résilience. La plateforme « ma cantine » a été développée pour soutenir la mise en œuvre de cette obligation».

Alors que la restauration hors domicile utilise de plus en plus de viandes de poulet importées d’Ukraine en plus de celles du Brésil pour diminuer le prix de revient de chaque repas, il reste à voir quels effets auront les recommandations du gouvernement pour promouvoir la qualité et la place du bio dans la restauration collective en 2024 et après.

QOSHE - Communication gouvernementale face au recul des produits bios - Gérard Le Puill
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Communication gouvernementale face au recul des produits bios

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12.03.2024


Dans une note de 20 pages publiée le 7 mars, le gouvernement faisait mine de vouloir relancer la croissance des denrées alimentaires issues de l’agriculture biologique. Face au recul des achats de produits bio par les ménages, il sollicitait la restauration collective pour prendre le relais. Mais cette dernière donne la priorité aux produits importés à bas prix.

Les différentes communications que nous avons pu lire à l’occasion de la tenue du Salon international de l’Agriculture nous montrent que les consommateurs français naviguent sur un océan de contradictions. Ils font part de leur désir de consommer français en réduisant le bilan carbone de leur alimentation. Mais le recul de leur pouvoir d’achat les oriente vers les «premiers prix» dans les magasins de la grande distribution. Rendu public le 7 mars, un texte commun du gouvernement et de l’Agence de la transition écologique (ADEME) nous dit que « la majorité des Français (77%) semble considérer que les citoyens font leur part de l’effort de sobriété ». Du coup, « ils attendent des actions plus fortes de la part de l’État et des entreprises ».

Publié le 26 février, au........

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