Revoici le remaniement !
Deviner un casting, anticiper disgrâces et promotions, relayer les rumeurs les plus farfelues est un sport national pour ceux qui aiment commenter la politique. Pour tourner la page d’une année politique difficile, marquée par une réforme des retraites contestée par la majorité des Français et par une loi immigration qui a profondément divisé la majorité, quoi de mieux pour Emmanuel Macron que de s’offrir un nouveau gouvernement ? Tout cela paraît logique, et pourtant… l’utilité politique du changement d’équipe gouvernementale sous la présidence d’Emmanuel Macron n’a rien d’évident.

Jamais un changement de Premier ministre, et encore moins de casting, n’a véritablement et durablement redonné de l’air au Président.

Là où un Manuel Valls avait (provisoirement) redonné un peu de souffle à François Hollande à sa nomination, on n’a observé aucun rebond de popularité du Président au moment de la nomination de Jean Castex, ou des changements successifs opérés autour d’Élisabeth Borne.

La raison est simple : à force de pouvoir vertical, les Français ont fini par se convaincre, à tort ou à raison, que le Président décidait de tout, et que le reste du casting n’était composé que de figurants plus ou moins distrayants (plutôt moins).

Remplacer une quasi inconnue, n’ayant pas de ligne et de marque politique autonome, par un autre inconnu n’est pas ce que l’on pourrait appeler un signal politique fort.

Un remaniement aurait du sens s’il consistait à nommer un Premier ministre autonome, ayant sa propre légitimité politique – par exemple, parce qu’il apporterait des députés supplémentaires à la majorité.

La chronique politique de Chloé Morin : "L'opinion ne s'indigne pas de la loi immigration"

Un remaniement aurait du sens s’il signait un élargissement de la majorité, ou un déplacement de son centre de gravité.

Il aurait du sens si le ou la cheffe du gouvernement négociait avec le Président et la majorité une feuille de route claire, distincte d’un programme présidentiel dont personne ne se souvient de toute façon.

Un vrai remaniement, enfin, apporterait des poids lourds politiques, des hommes et des femmes choisis pour leur expérience de terrain, et non pour leur capacité à serrer les rangs sans faire de vagues. S’il ne coche pas ces cases, il y a fort à parier que nous ne parlerons déjà plus du remaniement dimanche prochain…

Chloé Morin